Interview de Naoko Mazda pour Réimp !
Nombreux sont ceux qui aspirent aujourd’hui à devenir mangaka ou éditeur manga. Mais saviez-vous que ce n’était pas la seule manière de travailler dans le manga ? C’est ce que va découvrir Kokoro, embauchée dans une maison d’édition pour avoir fait une prise de judo à son président. Affectée à l’éditorial manga, elle va peu à peu faire connaissance avec l’univers qui l’entoure… À la différence de Bakuman qui présente un huis-clos entre un auteur et un éditeur souhaitant créer le prochain hit shonen, Réimp’ ! offre une description plus réaliste et seinen, avec une multitude de personnes : commerciaux, libraires, graphistes, assistants… tous là pour porter l’oeuvre jusqu’à son lecteur.
Avec un style brut mais sensible, Naoko Mazda, l’autrice décrit avec fougue la passion qui habite tous ses personnages. Elle revient sur la création de la série dans cette interview exclusive.
- Comment vous est venue l’idée du scénario ?
Au tout départ, mon éditeur m’a proposé “Et si tu créais une série sur un métier ?”. Je suis mangaka, j’ai longuement été assistante, mon mari et ma soeur sont éditeurs…
Je me suis dit que je pourrais raconter une histoire sur un éditeur de manga et son auteur. Mais au fil des discussions, nous avons pensé que nous pourrions aller beaucoup plus loin. C’est donc avec l’aide de libraires, imprimeurs, graphistes, fabricants, responsables d’impression, distributeurs, diffuseurs, correcteurs… et bien d’autres, que je suis passée de “l’éditorial d’une maison d’édition” au “chemin que parcourt un livre pour arriver dans les mains du lecteur”.
- Comment avez-vous appris autant de choses sur le monde de l’édition ? Aviez-vous déjà une idée de tous vos personnages au début de la série, ou bien les avez-vous imaginés au fil des rencontres ?
Les personnages naissent de mes discussions avec les personnes que j’interroge. Toutes exercent leur métier avec passion et sincérité, elles m’inspirent. C’est leur ferveur, mêlée au scénario du manga, qui donne naissance aux personnages. Je suis moi-même parfois étonnée de mes personnages et il m’arrive de me dire “Il est comme ça, lui ? C’est un type super !”.
- De quel personnage vous sentez-vous la plus proche ? L’héroïne Kokoro, ou bien quelqu’un d’autre ? Pourquoi ? Et à l’inverse, y a-t-il un personnage qui est très différent de vous ?
Le personnage qui ressemble le plus à celle que j’ai été par le passé est le jeune auteur Tamachi, qui apparaît dans le chapitre 13. Il ne connaît pas les bonnes manières et a une très haute opinion de lui-même. Quand je repense à comment j’étais quand j’apportais mes planches aux maisons d’édition, je me mets à trembler. Et Haku Nakata, qui se montre intransigeant avec le monde qui l’entoure, c’est aussi moi à une certaine époque.
La personne la plus éloignée est Kokoro Kurosawa, l’héroïne. Elle est tellement différente de moi que je me sens encouragée lorsque je la dessine. Quant à mes amis mangaka, ils sont nombreux à se reconnaître dans Issun Takahata.
- Quels conseils pouvez-vous donner à une personne souhaitant travailler dans le manga ?
C’est déjà formidable d’avoir trouvé une passion, alors pouvoir en faire un métier est un vrai bonheur. Libérez-vous des préjugés et des stéréotypes, et foncez. Je compte sur vous pour me donner du travail.
JUHAN SHUTTAI! © 2013 Naoko MAZDA / SHOGAKUKAN